Nicolas Schmit au sujet du chômage des jeunes

Lëtzebuerger Journal: Si le chômage des jeunes augmente en nombre, sa proportion tend à diminuer au fil des années...

Nicolas Schmit: C'est à la fois une mauvaise nouvelle et une pas trop mauvaise nouvelle puisque ça veut dire que les jeunes ont moins de risque d'être au chômage que les moins jeunes, puisque le chômage en général augmente plus vite que chez les jeunes. Et cela tient à plusieurs facteurs dont celui de la qualification. Ce sont surtout les personnes les moins qualifiées qui représentent la part la plus importante du chômage au Luxembourg donc, on peut dire que les jeunes sont un peu mieux formés que leurs ainés et donc, il y a un risque un peu moindre pour les jeunes de tomber au chômage que pour les personnes plus âgées.

Lëtzebuerger Journal: Il y a des plans qui ont été mis en place avec l'Adem pour lutter contre le chômage des jeunes...

Nicolas Schmit: Il y a différents aspects. Cette année, nous avons discuté avec les partenaires sociaux d'un plan d'action en faveur de l'emploi des jeunes. Il y a tout d'abord l'introduction de la garantie jeune. Au départ, il s'agit d'une recommandation européenne. Elle stipule qu'aucun jeune ne doit être laissé de côté pendant plus de quatre mois: il faut lui proposer un emploi, un retour à l'école ou une formation, ou une autre mesure où il peut être formé, ou travailler. Je veux qu'à la fin de l'année 2013, nous soyons capables à l'Adem de mettre en oeuvre cette garantie jeune. A priori, tout jeune doit avoir une proposition au plus tard à la fin du quatrième mois où il s'est inscrit à l'Adem.

Lëtzebuerger Journal: Aurez-vous les ressources nécessaires pour mettre cela en place?

Nicolas Schmit: Il faut se les donner. Ou bien nous faisons de l'emploi des jeunes une priorité et là, il faut se donner les moyens et économiser ailleurs. Et je n'accepterai pas, et je suis formel, qu'on fasse des économies sur le dos des jeunes à la recherche d'un emploi. (...) Ça serait paradoxal que maintenant que le chômage augmente au Luxembourg, on commence à vouloir économiser sur les politiques de l'emploi. Et quand il y avait moins de chômage, on jetait presque l'argent par les fenêtres pour la politique de l'emploi, avec des effets douteux.

Lëtzebuerger Journal: Il y a d'autres projets en chantier, et quels sont-ils?

Nicolas Schmit: Dans le cas du processus de réforme de l'Adem, il faut renforcer la capacité d'accueil des jeunes, il faut renforcer le service emploi des jeunes et cela nécessite des ressources supplémentaires. Il faut savoir tout particulièrement en période de crise établir ses priorités. Pour ce qui est de la révision des mesures pour l'emploi des jeunes, nous n'avons malheureusement pas réussi à les faire adopter à la fin de cette année. Elles seront à l'ordre du jour de la Chambre au début de l'année prochaine. Le projet de loi a été déposé et nous allons recentrer, recibler les mesures jeunes pour en faire une vrai entrée dans la vie active, pas une voie de parking.

Lëtzebuerger Journal: Comment a été élaboré ce plan?

Nicolas Schmit: Ce sont des mesures jeunes telles que le CAE et le CIE que nous avons révisées. Elles font l'objet d'une loi qui a été déposée et qui va être dcutée et adoptée à la Chambre au début de l'année prochaine. Cela fait partie du contexte général du plan d'action, qui a encore été discuté lors de la dernière réunion du CPTE début décembre, avec les partenaires sociaux.

Lëtzebuerger Journal: Certains jeunes sans emploi ont aussi très peu de formation...

Nicolas Schmit: Nous avons déjà mis en oeuvre un premier projet pour ces jeunes les plus faibles, les moins qualifiés. Le deuxième va être lancé en janvier. Je suis en pourparlers avec le secteur économique pour trouver une formule permettant à ces jeunes d'être intégrés dans les entreprises sous des modalités à définir. Parce que je crois que la seule chose pour permettre à ces jeunes d'accéder au marché du travail et à un emploi, c'est l'entreprise.

Lëtzebuerger Journal: Donc vous allez les mettre en immersion dans la vie du travail?

Nicolas Schmit: Oui, et nous sommes en train de discuter des conditions, quels contrats de travail, quelles subventions. Il y aura une première phase de formation initiale de 2 à 3 mois, puis un stage entreprise, puis un contrat de travail dont nous sommes en train de discuter des modalités.

Lëtzebuerger Journal: Pensez-vous que les entreprises accepteront des jeunes sans qualifications spécifiques?

Nicolas Schmit: Je crois qu'il y a quand même des besoins pour des jeunes peu qualifiés. C'est un engagement. J'avais réuni l'année dernière des employeurs qui m'avaient dit qu'ils étaient prêts à s'engager sur l'emploi de ces jeunes-là. Bon, nous avons encore des discussions et des réunions pour discuter des modalités d'emploi. Il y a aussi d'autres projets qui sont en train d'être concrétisés et qui visent à améliorer l'offre de formation complémentaire ou initiale pour les jeunes. Cela va être réalisé l'année prochaine sûrement.

Lëtzebuerger Journal: Certains jeunes poursuivent des études, mais peinent ensuite à trouver un emploi...

Nicolas Schmit: Là il faut voir s'il leur manque une formation, ou, s'ils n'ont pas une formation tout à fait utilisable, comment on peut réorienter ces jeunes. Cela va être lancé l'année prochaine avec notamment la Maison de l'orientation et aussi les employeurs et les partenaires sociaux. Nous mènerons cette discussion au début de l'année prochaine.

Lëtzebuerger Journal: On remarque de gros écarts entre certains pays de l'Union européenne pour le chômage des jeunes. Au Luxembourg, il est de 18% et chez nos voisins allemands, il n'est que de 8%...

Nicolas Schmit: Il y a un aspect qui nous distingue de nos partenaires allemands. L'Allemagne a un système très efficace de formation dans l'entreprise. Et l'apprentissage dans les entreprises permet à l'Allemagne d'avoir des résultats tout à fait positifs, comme l'Autriche en fait. Et donc, il faut redécouvrir les vertus de l'apprentissage en entreprise, et soutenir cet apprentissage en entreprise. C'est aussi un volet du plan d'action.

Lëtzebuerger Journal: On le sait, au Luxembourg, beaucoup d'étudiants quittent le pays pour poursuivre leurs études supérieures. Ne pensez-vous pas que le fait qu'ils s'éloignent du pays provoque, dans une certaine mesure, une perte du suivi et des contacts construits ici?

Nicolas Schmit: Je ne pense pas. Avant qu'ils ne partent pour leurs études, nous avons mis en place la Maison de l'orientation et chacun doit aller s'informer sur les possibilités d'emploi que lui offre la formation qu'il souhaite faire. Bien sûr, il y a beaucoup de jeunes qui doivent faire des stages et donc, ils peuvent revenir au pays pour les faire. Et puis, il importe qu'ils continuent à s'informer sur les possibilités d'emploi au Luxembourg. Bien sûr, certaines formations offrent davantage de chances d'emploi à l'étranger qu'au Luxembourg.

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