Action internationale "coup de poing" "Euro-Phénix"

Descente pluri-administrative sur les anciennes friches sidérurgiques du Bassin Minier

Action internationale "coup de poing" "Euro-Phénix"

Dans le cadre du dispositif (record) élargi dénommé "CIALTI" (Cellule inter administrative de lutte contre le travail illégal), 47 agents de 13 (treize) Administrations de contrôle (dont 6 fonctionnaires de 4 autres Etats-membres de L’UE) ont inspecté systématiquement, en date du 10 juillet, le chantier de la future "Maison du Savoir" de l'Université du Luxembourg à Esch-Belval.

La mission des enquêteurs

Dans le "focus" des enquêteurs se trouvaient le respect de conditions de travail sûres et saines des salariés sur le site, au même titre que le travail illégal transfrontalier dans toutes ses variantes, générateur de "dumping social" et partant de concurrence déloyale pour les entreprises légalement établies au Grand-Duché.

Les moyens mis en œuvre

Détail des effectifs:

La "Task- force" d’une cinquantaine de personnes (47 agents et 2 employés) se composa de :

  • 15 agents de l’Administration des Douanes et accises;
  • 9 agents de la Police Grand-Ducale (Police spéciale Esch, Commissariats de proximité et SCP);
  • 2 agents du "Service anti-fraude"de l’Administration de l’Enregistrement et des domaines;
  • 2 agents du Service "contrôle" du Centre commun de la sécurité sociale
  • 2 agents de la Division de la santé au travail, dont un médecin-inspecteur du travail du Service médical de l’immigration;
  • 2 contrôleurs de l’ADEM
  • 10 inspecteurs du travail ou sociaux européens (4 belges, 3 français, 2 polonais et 1 portugais)
  • 5 inspecteurs du travail et deux employés (« back-office mobile ») de l’Inspection du travail et des mines,

Dimension paneuropéenne du contrôle pluridisciplinaire

En vertu d’accords bilatéraux conclus entre l’ITM et les Inspections du travail homologues ou des organismes assimilés (p.ex. Inspections sociales) de Belgique, de France, de Pologne et du Portugal, 10 inspecteurs du travail et des lois sociales ont participé en qualité d’observateurs à l’action internationale.

Remarque introductive :

En attendant l’introduction territoriale d’une carte d’identité sociale électronique, ("badge social") décidée lors d’une "tripartite sectorielle" du 19 avril dernier, pour toute personne, salariée ou indépendante, circulant sur un chantier, dès 2013, ce contrôle interdisciplinaire classique (avec "bouclage", "ratissage" et occupation de locaux lors des opérations d’instruction) a été facilité grâce à un confinement général adéquat et notamment un auto-contrôle d’accès du chantier assuré par un service de gardiennage, qui dresse des listes de pointages en temps réel et délivre des badges simplifiés aux salariés.

Seule la rétention de diverses pièces d’identité, voire cartes bancaires des salariés en échange des badges a fait l’objet de critiques (protection des données).

La coopération des acteurs responsables, (maître d’ouvrage, "project management" (chef de chantier), coordinateur sécurité/santé) avec les autorités publiques était qualifiable de prompte et constructive.

Les résultats obtenus

L’évaluation du contrôle des 105 salariés, dont 30 intérimaires et 24 détachés, présents sur le site, a permis d’acter les conclusions globales suivantes,

Sécurité :
- constat de risques d’accidents graves, voire mortels, alors que de nombreuses protections collectives contre les chutes de hauteur avaient été enlevées (et non-remises) par des corps de métiers irresponsables, nonobstant instructions écrites non-équivoques du "coordinateur sécurité/santé" (journal de coordination)
-mise en conformité immédiate ordonnée par l’ITM et exécutée in situ par des équipes spécialisées
-Problème d’actualisation des mises à jour des "avis préalables" (documents que le maître d’ouvrage doit faire élaborer par un coordinateur "sécurité-santé" agréé) pour la version affichée obligatoirement sur le site.

Santé au travail :
-3 salariés communautaires détachés (par un sous-traitant, n’apparaissant pas sur l’avis préalable et dont le dirigeant fut injoignable) travaillant sur des postes à risques spécifiques, furent contrôlés par le médecin-inspecteur et ont déclaré ne jamais avoir passé de visite médicale d’aptitude au travail dans leur pays d’origine.
-Ces personnes se trouvaient par ailleurs en dépassement de 50% par rapport à la durée maximale de travail autorisée (60 heures/semaine) avec un risque d’accident du travail imputable au surmenage de sorte qu’elles ont dû être éloignés temporairement de leurs postes par l’ITM et mis au repos forcé ;
- 2 salariés d’une entreprise luxembourgeoise n’avaient pas encore passé leur visite médicale de sorte que la même mesure d’arrêt de travail sur le poste à risque spécifique occupé a dû être prise, l’employeur dûment averti;
- A part l’omission de transcription des fiches pour 4 anciens salariés (avec contrats de mission temporaires) issus d’une grande entreprise de travaux publics en faillite, les 30 salariés intérimaires présents, nonobstant les délais raccourcis dans le domaine de la main-d’œuvre temporaire, possédaient des certificats d’aptitude médicale;
- Les certificats d’aptitude au travail de six travailleurs détachés (non-joints aux documents obligatoirement tenus au Luxembourg par la "personne physique détentrice" restent à produire.

Respect du droit du travail et lutte contre le dumping social :
- selon les déclarations chiffrées individuelles de l’ensemble des salariés aux inspecteurs du travail présents, ils seraient tous payés (indemnités de déplacement etc…comprises) conformément, voire au-dessus des barêmes prévus par notre législation d’ordre public sur le salaire minimum ou les conventions collectives de travail d’obligation générale; (10,4 euros pour un emploi non-qualifié et 12, 5 euros sur un poste qualifié).
- L’instruction complémentaire par l’ITM est encore en cours, également concernant l’imputation des diverses catégories d’indemnités connexes (déplacement ; logis ; nourriture)

Détachement de salariés :
-3 entreprises détachantes originaires de 3 Etats-membres différents étaient connues du "Pôle détachement et travail illégal" de l’ITM, mais avaient omis de déclarer spécifiquement ce chantier;
- Un sous-traitant d’un groupe d’entreprises européen n’avait pas notifié de "CDS" (communication de détachement de services) ;
- Les 4 encourent une injonction de mise en conformité de l’ITM, assortie d’un délai de 24 heures;
- Pour une entreprise du Sud de l’Europe, tous les salariés détachés n’étaient pas communiqués ;

Sécurité sociale :
- 1 salarié détaché n’a pu produire son formulaire A1 à l’agent du CCSS;
- Pour 3 salariés, l’affiliation au Grand-Duché a dû faire l’objet d’une vérification supplémentaire

Droit d’établissement (travail clandestin) :
- les agents compétents de l’Administration des douanes et accises vérifient actuellement la conformité d’entreprises ayant présenté des irrégularités par rapport au droit d’établissement ;
- Fraudes ou irrégularités d’ordre fiscal : le Service anti-fraude de l’Administration de l’enregistrement et des domaines a pu constater, que toutes les entreprises présentes étaient conformes au niveau des obligations en matière de TVA;
- Emploi : des demandeurs d’emploi indemnisés ou non-indemnisés n’ont pas été détectés, mais l’Agence pour le développement de l’emploi a contrôlé des entreprises n’ayant pas respecté l’obligation de déclarer tout poste vacant auprès de l’ADEM, avant toute publication dans les médias.

Volet immigration :
La Police Grand-ducale, qui a vaqué à sa mission de maintien de l’ordre public et d’escorte des agents publics "civils" lors du contrôle, a pu vérifier qu’aucune personne présente sur le site n’était en situation irrégulière de séjour;
- Suivi international : l’ITM requiert actuellement via "IMI-Net" ("Internal Market Information System"), notamment le concours de ses collègues portugais (Autorité pour le contrôle des conditions de travail), aux fins de vérification de la régularité d’établissement des "maisons-mère" et de l’authenticité de certains documents produits par deux entreprises détachantes (certificats, attestations, diplômes etc…)

Conclusion :
Sur des chantiers de taille, afin de minimiser les risques d’accidents graves, susceptibles de retarder considérablement le projet, le maître d’ouvrage devrait veiller à convenir d’une extension de mission avec le coordinateur sécurité/santé, son adjoint ou un surveillant tiers (genre "Hüttenpolizist") afin d’être en mesure de vérifier en temps réel la mise en œuvre des consignes de sécurité, eu égard à un risque de coactivité, amplifié encore dramatiquement dans la phase autrement par essence aléatoire du parachèvement.

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